L'été 2018 sera l'occasion de découvrir ou re-découvrir le travail de Nadège Prugnard avec des lectures, des installations artivistes et une nouvelle résidence d'écriture pour la prochaine création 2019 de la compagnie.
"No Border"
De Nadège Prugnard, mise en lecture par Guy Alloucherie
(projet de la cie HVDZ)
Jeudi 12 Juillet à 19h30
La Manufacture à Avignon (84)
"No Border"
De Nadège Prugnard, mise en lecture par Guy Alloucherie
(projet de la cie HVDZ)
Mercredi 25 Juillet à 18h
Musée Henri Lecocq, Clermont-Ferrand (63)
Festival les Contre-plongées
"Pas Pieds"
Installation artiviste de Nadège Prugnard et Julie Romeuf
Du 22 au 29 Juillet
Clermont-Ferrand (63)
Festival les Contre-plongées
"No Border"
De Nadège Prugnard, mise en lecture par Guy Alloucherie
(projet de la cie HVDZ)
Saemdi 18 août à 16h
Théâtre l'Estaminet d'Uzeste (33)
41e Hestejada de las Arts, entrée payante
"No Border"
De Nadège Prugnard, mise en lecture par Guy Alloucherie
(projet de la cie HVDZ)
Jeudi 23 Août à 14h
Lycée Saint-Géraud, rue du Collège, Aurillac
Festival international de théâtre de rue
"Fado dans les veines"
Création 2019
Résidence d'écriture
du 1er au 15 août
Centre culturel Villaflores à Guimaraes au Portugal
"Les Bouillonnantes"
Coécriture Koffi Kwahulé et Nadège Prugnard
Du 23 août au 1er septembre
Théâtre des Ilets-CDN de Montluçon (03)
Crédit Photo Christian Stavel
"No Border"
De Nadège Prugnard, mise en lecture par Guy Alloucherie
(projet de la cie HVDZ)
Jeudi 12 Juillet à 19h30
La Manufacture à Avignon (84)
Mercredi 25 Juillet à 18h
Musée Henri Lecocq, Clermont-Ferrand (63)
Festival les Contre-plongées
Samedi 18 Août à 16h
Théâtre l'Estaminet d'Uzeste
41e Hestajada de las Arts
Jeudi 24 Août à 14h
Lycée Saint-Géraud, Aurillac
Festival international de théâtre de rue (Association Eclat)
« NO BORDER est un texte inspiré d’un travail d’écriture de terrain que j’ai mené pendant deux ans à arpenter la « Jungle » de Calais à la rencontre des exilé(e)s hommes et femmes qui fuient la guerre et la dictature dans leurs pays et qui espèrent trouver asile en Europe. NO BORDER est un « poème » ininterrompu, pensé pour 1 ou 15 ou X (acteurs chanteurs danseurs et circassiens), un monologue pluriel et haletant imaginé comme la flamme fragile que se passe de main en main les coureurs de marathon. Il n’y a pas « d’histoire » à proprement parler, NO BORDER c’est une sorte de tour de Babel, un édifice d’âmes multiples qui s’inscrit dans l’écriture comme un impétueux torrent, comme une vague qui submerge, c’est une lutte âme à âme qui parle du combat du vouloir vivre de celles et ceux qui franchissent les océans les murs les frontières au péril de leurs vies et que je tente de construire en miroir avec nos propres migrations intimes, nos propres errances et questionnements sur la question des moteurs de la violence d’aujourd’hui, de la « déshumanisation » , du sens de la communauté et de l’état de notre démocratie. NO BORDER, c’est une odyssée faite de milles voix, mille espoirs inassouvis, mille révoltes inconsolables, c’est aussi en filigrane l’histoire de ma propre traversée à arpenter sans relâche le ghetto calaisien nommé « Jungle » à la rencontre des exilé(e)s au bord du monde. » Nadège Prugnard
« Les cris cognent contre nos propres fêlures, mais l'inverse aussi. Tous les mots circulent d'un Je à l'Autre dans cette mélopée bestiale, et ces reflets incessants traduisent la parole commune des expatriés d'un monde où l'on a délogé la tendresse." Génica Backynski, L’Humanité, Avril 2018
« No Border est un démontage poétique, une tresse qui mêle sa vie intime, ses fêlures, avec les drames de ces êtres humains à la fois « morts et vivants » » Clarisse Fabre, Le Monde, Février 2018
"Moment intense. On est suspendus à ses lèvres [...] Lever les frontières, faire tomber les murs [...] Alors Nadège Prugnard dégaine ses armes, les seules qu'elles possèdent, des mots pour retrouver notre dignité perdue." Marie-Josée Sirach, L'Humanité, Juillet 2017
« Mots crus en intraveineuse, langues tout en cris, larmes et tambours, rythme enflammé par la lave de l’émotion… Nadège Prugnard éruptive et sensible, sait nous parler d’eux, de nous. Elle nous réapprend à écouter ce grand hurlement de l’Histoire, là, tout proche. » Stéphanie Ruffier, théâtre du blog, Avril 2017
"Pas Pieds"
Installation artiviste de Nadège Prugnard et Julie Romeuf
Du 22 au 29 Juillet
Clermont-Ferrand (63)
Festival les Contre-plongées
En 2015, Nadège Prugnard et Julie Romeuf ont récolté des messages et des chaussures laissés par les « hommes en marche » dans le bidonville surnommé « la jungle » à Calais. A Calais puis pour NUIT BLANCHE à Bruxelles en 2016, ces pas et papiers de migrants sont installés à des endroits symboliques, comme en provocation au déni d’humanité qui persiste à Calais et ailleurs. Une performance politique et poétique, qui questionne aussi l’engagement de l’artiste dans le monde.
"Il faut parfois des artistes pour réhabiliter la ville, dire l’absence et rendre la présence à nouveau possible. Pas grand’ chose, de courts messages écrits par des exilé-e-s, quelques vieilles chaussures, déposés au fil de la ville."
Des pas dans la ville
Blog Passeurs d'hospitalité par Philippe Wanesson
"Fado dans les veines"
Création 2019
Résidence d'écriture
du 1er au 15 août
Centre culturel Villaflores à Guimaraes au Portugal
« J’ai deux pays la France et le Portugal. Mon grand-père ainsi que des milliers d’autres portugais sont arrivés en France an fuyant le régime autoritaire de Salazar ; c’est de cette migration ancienne, intime et politique, de ce fado qui coule dans mes veines, de ce fado de l’âme et de l’exil que j’ai toujours caché comme un secret impossible à prononcer, dont je souhaite aujourd’hui faire poème… A partir de récoltes de paroles en France et au Portugal en complicité avec le CDN de Montluçon et la ville de Guimarães, il s’agira de composer le poème parlé-chanté des déracinements, du fatum, de l’absence, de la mélancolie, du vent qui balbutie… mais aussi la chanson-protestation, musicale et symbolique à la gloire du peuple et des résistances du Portugal d’hier et d’aujourd’hui. » Nadège Prugnard
"Les Bouillonnantes"
Coécriture Koffi Kwahulé et Nadège Prugnard
Du 23 août au 1er septembre
Théâtre des Ilets-CDN de Montluçon (03)
Le projet Les Bouillonnantes est né de l’envie de l’auteur ivoirien Koffi Kwahulé d’interroger des femmes habitant des quartiers de Montluçon sur la perception sensible qu’elles ont de leur histoire et de leur quartier. Ce désir a rencontré celui de Nadège Prugnard, écrivaine dont le grand-père immigré portugais vivait dans les Combrailles et qui, elle, partira à la rencontre d’habitantes du territoire de Marcillat-en-Combraille.
Cette première phase de travail se déroulera de novembre 2017 à mai 2018 et inspireront ensuite aux deux écrivain.e.s deux textes originaux qui seront mis en lien et en scène par Carole Thibaut et en musique par Camille Rocailleux, afin de créer à l’automne 2018 Les Bouillonnantes, spectacle texte & musique, sorte de récital musical-rock-poétique, pour deux musicien.ne.s et trois actrices-chanteuses (Nadège Prugnard, Valérie Schwarcz, Carole Thibaut).
Retour presse "No Border"
Libération / Aurélie Charon - Juillet 2018
ALLOUCHERIE, ÉCHOS ET ÉCRITS DE LA « JUNGLE »
Le directeur artistique pas-de-calaisien a mis en scène la lecture de son prochain spectacle, « No Border », consacré aux migrants. L’auteure Nadège Prugnard a écrit le texte et le porte de sa voix.
L’actualité est aphone. On n’entend plus rien, c’est devenu sec. Guy Alloucherie aime réveiller les voix mises en sourdine, monter le son. Pendant des années, il a déterré l’histoire ouvrière, lui, fils d’un homme qui a passé trente-sept ans dans les mines pour creuser le charbon. Depuis vingt ans, il a installé sa compagnie en contrebas des terrils dans le Nord Pas-de-Calais. Il a placé Loos-en-Gohelle, 6 000 habitants, à la pointe de l’écoute du monde.
Complexité.
La question des réfugiés est arrivée avec Mireille, une militante, il y a dix ans. Dans le spectacle les Sublimes, elle témoigne en vidéo : elle avait hébergé des réfugiés. Guy Alloucherie est persuadé que pour parler de la complexité du monde, il faut aller à Calais. « Mais comment trouver la distance poétique, sans que ce soit un discours donneur de leçon » ? Il va voir jouer Nadège Prugnard, trouve « un alter ego », a la solution. Elle a peur de l’effrayer avec son parcours scène rock-arts de la rue, lui est sûr que c’est la voix qu’il faudra.
Pendant deux ans et demi, Nadège Prugnard parcourt la « jungle ». Elle commence à l’époque où il n’y a que trois-quatre tentes, sera témoin de la ville-monde en train de se construire et de son démantèlement. On n’entre pas comme ça : elle se lance comme bénévole. « Je me rends vite compte que ça ne sera pas suffisant. Il faut que je trouve un déclencheur de parole, autre que l’urgence. » Et là, idée : « Le coup des fleurs. » Des roses, des jonquilles, des graines dans la « jungle ». Nadège Prugnard apporte des fleurs. « Le temps a été suspendu, on s’est mis à parler. »
Elle réalise qu’il n’y a que les gestes artistiques, symboliques, qui permettent à la « jungle » de sortir d’un rapport au temps imposé par la nécessité. Elle interroge migrants, bénévoles, médecins, routiers, Calaisiens et commence à angoisser : tellement à dire. « Je n’avais jamais vu la vie arriver à ce niveau-là » : ceux qui sont morts cent fois ne s’apitoient pas. Elle cherche un geste d’écriture « sans tomber dans le cliché ultra-militant ou le réalisme sordide ».
La réalité ne fait pas de cadeau : on est trop collés, ou trop loin. Le juste milieu est rare. Les premiers mots seront donc «je suis perdue ». Aveu qui ouvre sur un poème traversé par mille voix. On remercie Guy Alloucherie d’avoir compris qu’il ne fallait pas les disperser : un seul être pour les porter. C’est Nadège Prugnard elle-même qui dit les mots et forme alors l’image de ces vies que le monde en 2018 projette les unes contre les autres.
« Forum ».
Pour la création qui sera présentée à Béthune et Loos-en-Gohelle, Guy Alloucherie imagine du gumboot, danse de protestation des mineurs noirs d’Afrique du Sud durant l’apartheid. « Et pourquoi pas Facebook aussi, pour servir le propos ?» A l’Ecole d’art d’Avignon, un élève a réalisé un film sur le rapport de Guy Alloucherie aux réseaux sociaux. Mohamed El Khatib et Lorraine de Sagazan lisent ses posts Facebook à propos de Calais, nouvel espace de dialogue avec la réalité. A la Manufacture, la question des réfugiés traverse plusieurs spectacles, dont deux à l’intérieur du « Focus Arabe » proposé par le metteur en scène égyptien présent dans le in, Ahmed El Attar.
Guy Alloucherie se souvient de la question du CRS à l’entrée du camp : « Vous n’avez pas de marteau ?» Le crime, c’était reconstruire quand les autorités voulaient faire disparaître. Le mot « forum », trouvé par Zimako, le créateur de l’école de la « jungle », lui manque. « C’était un forum, une discussion mondiale, quelque chose naissait.» Il est désespéré d’entendre, il y a peu encore, des cousins se plaindre des migrants vivant à cinq kilomètres de leur maison bourgeoise, avoir peur « qu’ils arrivent chez nous ». Il lâche un dernier mot, à la façon de l’ancien combattant, pas dupe, qui sait qu’on aurait pu éviter la guerre : « J’en ai marre du malheur. »
Théâtrez nous / Nassim Kebel juillet 2018
No Border, Guy Alloucherie & Nadège Prugnard
Pour le jour de relâche de la Manufacture le 12 juillet, des lectures étaient proposées au public hypothétiquement désœuvré. À 19h30, No Border, un texte lu et écrit par Nadège Prugnard, en collaboration avec Guy Alloucherie. C’est lui qui a fait appel à elle, en 2015, pour créer un spectacle autour de la question migratoire, et en particulier de la Jungle de Calais. L’autrice a donc sillonné régulièrement la Jungle, jusqu’à son démantèlement. Le texte se fait l’écho de cette immersion : il se présente comme une grande prise de parole d’un « je » qui tente de saisir ce qui passe à sa portée, nous faisant voyager entre les mots des personnes rencontrées et les images qui le traversent.
« Je suis perdue », la première phrase du texte revient le rythmer régulièrement. Tout le texte semble être le récit d’une perte, qui est multiple. C’est celle du « je », qui erre dans la Jungle, celle de ces « gens au bord du monde », coincés à Calais et qui rêvent de rejoindre l’Angleterre voisine, celle des valeurs humanistes de la république française, meurtrière des réfugié.e.s, qui dépense toujours davantage en effectifs de police et en équipements militaires tout en arguant de l’impossibilité économique de l’accueil des migrants. « Où est Vénus ? » Autrefois étoile du berger, la planète Vénus n’est plus là pour guider les voyageurs, et le texte déploie les aspects concrets et métaphoriques de cette image : où est l’amour de l’humanité, quand l’Europe s’applique à rendre indigne toute possibilité d’accueil.
Le texte égrène des histoires singulières de migrant.e.s et leurs interactions avec la narratrice. Il est volontiers lyrique, mais d’un lyrisme que l’élocution rapide de Nadège Prugnard rend sauvage et pas pesant – les images défilent, nous engloutissant dans un tunnel de sensations diverses sans s’arrêter sur chacune, que ces images fassent appel à des références mythologiques (des figures de la tragédie grecque reviennent à plusieurs reprises) ou soient des prises en charge poétique des atrocités vues et rapportées par les migrant.e.s. Un certain humour est cependant toujours aussi là, en sourdine, manifestant la conscience de la narratrice du caractère dérisoire de sa démarche : il n’y a là ni autocélébration, ni accaparation théâtrale de la cause migratoire. Il s’agit bien du déploiement d’interrogations personnelles, qui questionnent notre rapport à la politique française et européenne sur la question des réfugié.e.s, tout en rendant hommage, avec beaucoup d’émotion, aux rencontres faites au fil de ce projet, aux humains qui butent sur nos frontières.
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